Que doresnavant tous gentilzhommes qui sont barons, chastellains, haultz
justiciers et seigneurs tenans plain fief de haubert et chacun d’eulx puissent
vivre en leurs maisons, esquelles ilz habiteront, en liberté de leurs
consciences et exercice de la Religion qu’ilz disent reformée avec leurs
familles et subjectz, qui librement et sans aucune contraincte s’y vouldront
trouver, et les autres gentilzhommes aians fief aussi en leurs maisons, pour
eulx et leurs familles tant seulement, moiennant qu’ilz ne soient demeurans es
villes, bourgs et villages des seigneurs haultz justiciers autres que nous,
ouquel cas ilz ne pourront esd. lieux faire exercice de lad. Religion, si n’est
par permission et congé de leursd. seigneurs haultz justiciers et non
autrement.
Et quant à tous autres de lad. Religion pretendue reformée qui sont demeurez en
icelle Religion jusques à present, leur permectons se retirer en leurs maisons,
où ilz pourront estre et demeurer, et par tous les autres endroictz de nostre
royaume aller, venir et vivre en toute liberté de conscience ; et aux
gentilzhommes et autres ayans haulte justice qui sont semblablement demeurez
jusques à present à lad. Religion portans les armes avec les susd. habitans
desd. villes et depuis led. vingt quatreiesme aoust dernier, leur permettons
aussi vivre en la mesme liberté de conscience en leurs maisons et y faire
seulement les baptesmes et mariages à leur façon acoustumée, sans plus grande
assemblée, oultre les parens, parrains et marraines, que jusques au nombre de
dix, fors et excepté en nostre court ne àdBOmis deux lieues alentour d’icelle, en la ville, prevosté
et viconté de Paris ne à dix lieues alentour d’icelle ville.
Henry, par la grace de Dieu roy de France et de NavarreaNavarre, conte de Provence, Forcalquier et terres adjacentes A3, à tous presens et advenir, salut.
Entre les graces infinies qu'il a pleu à Dieu nous departir, celle est bien des
plus insignes et remarquables de nous avoir donné la vertu et la force de ne
cedder aux effroyables troubles, confusions et desordres qui se trouverent à
nostre avenement à ce royaume, qui estoit divisé en tant de partz et de
factions que la plus legitime en estoit quasy la moindre ; et de nous estre
neantmoings tellement roydiz contre cette tourmente que nous l'ayons en fin
surmontée, et touchions maintenant le port de salut et repos de cest Estat. De
quoy à luy seul en soit la gloire toute entiere, et à nous la grace et
obligation, qu'il se soit voullu servir de nostre labeur pour parfaire ce bon
œuvre, auquel il a esté visible à tous si nous avons porté ce qui estoit non
seullement de nostre debvoir et pouvoir, mais encore quelque chose de plus, qui
n'eust peult-estre pas esté en autre temps bien convenable à la dignité que
nous tenons, que nous n'avons pas eu craincte d'y exposer, puisque nous y avons
tant de fois et si librement exposé nostre propre vie. Et en cette grande
concurrenceboccurence C de si
grandz et perilleux affaires ne se pouvans tous composer tout à la fois et en
mesme temps, il nous y a faillu tenyr cest ordre d'entreprandre premierement
ceulx qui ne se pouvoient terminer que par la force, et plustost remettre et
suspendre pour quelque temps les autres qui se debvoient et pouvoient traicter
par la raison et la justice, comme les differendz generaulx d'entre noz bons
subjectz, et les maulx particuliers des plus saynes parties de l'Estat, que
nous estimions pouvoir bien plus aysement guerir aprés en avoir osté la cause
principalle, qui estoit en la continuation de la guerre civille. En quoy nous
estans, par la grace de Dieu, bien et heureusement succeddé, et les armes et
hostillitez estans du tout cessées en tout le dedans du royaume, nous esperons
qu'il nous succedera aussy bien aux autres affaires qui restent à y composer,
et que par ce moyen nous parviendrons à l'establissement d'une bonne paix et
tranquile repos, qui a tousjours esté le but de tous noz veuz et intentions, et
le pris que nous desirons de tant de peines et travaulx, ausquelz nous avons
passé ce cours de nostre aage. Entre lesd. affaires ausquelz il a faillu donner
patience, et l'ung des principaulx, ont esté les plainctes que nous avons
receues de plusieurs de noz provinces et villes catholiques, de ce que
l'exercice de la religion catholique n'estoit pas universellement restably,
comme il est porté par les eeditz cy devant faictz pour la pacification des
troubles à l'occasion de la religion, comme aussy les supplications et
remonstrances qui nous ontcont souvent C esté faictes par noz subjectz de la Religion pretendue
reformée, tant sur l'inexecution de ce qui leur est accordé par lesd. eeditz,
que sur ce qu'ilz desireroient y estre adjousté pour l'exercice de leurd.
reli-gion, la liberté de leurs consciences et la seureté de leurs personnes et
fortunes, presumans avoir juste subject d'en avoir nouvelles et plus grandes
apprehensions à cause de ces der-niers troubles et mouvemens, dont le principal
pretexte et fondement a esté sur leur ruyne. A quoy, pour ne nous charger de
trop d'affaires tout à la fois, et aussy que la fureur des armes ne compatit
point à l'establissement des loix pour bonnes qu'elles puissent estre, nous
avons tousjours differé de temps en temps de pourvoir. Mais maintenant qu'il
plaist à Dieu com-mencer à nous faire jouir de quelque meilleur repos, nous
avons estimé ne le pouvoir mieux employer qu'à vacquer à ce que peult concerner
la gloire de son saint nom et service, et à pourvoir qu'il puisse estre adoré
et prié par tous noz subjectz ; et s'il ne luy a pleu permettre que ce soit
pour encore en une mesme forme et religion, que ce soit au moings d'une mesme
intention, et avec telle regle qu'il n'y ayt point pour cela de trouble et de
tumulte entre eulx, et que nous et ce royaume puissions tousjours meriter et
conserver le tiltre glorieux de Tres Chrestien qui a esté par tant de merites
et dès si long temps acquis ; et par mesme moyen oster la cause du mal et
trouble qui peult advenir sur le faict de la religion, qui est tousjours le
plus glissant et penetrant de tous les autres. Pour cette occasion, ayant
recongneu cest affaire de tres grande importance et digne de tres bonne
consideration, aprés avoir reprins les cahiers des plainctes de nozd. subjectz
catholiques, ayans aussy permis à nozd. subjectz de lad. Religion pretendue
reformée de s'assembler par depputez pour dresser les leurs et mettre ensemble
toutes leursd. remonstrances, et sur ce faict conferé avec eulx par diverses
fois, et reveu les eeditz preceddens, nous avons jugé necessaire de donner
maintenant sur le tout à tous nosd. subjectz une loy generalle, claire, nette
et absolue, par laquelle ilz soient reglez sur tous les differens qui sont cy
devant sur ce survenuz entre eulx et y pourront en-core survenir cy aprés, et
dont les ungs et les autres ayent subject de se contenter, selon que la qualité
du temps le peult porter, n'estans pour nostre regard entrez en ceste
deliberation que pour le seul zele que nous avons au service de Dieu, et qu'il
se puisse doresnavant faire et rendre par tous nosd. subjectz, et establir
entre eulx une bonne et perdurable paix. Sur quoy nous implorons et attendons
de sa divine bonté la mesme protection et faveur qu'il a tousjours visiblement
departie à ce royaume depuis sa naissance et pendant tout ce long aage qu'il a
attainct, et qu'elle face la grace à nosd. subjectz de bien comprandre qu'en
l'ob-servation de ceste nostre ordonnance consiste (aprés ce qui est de leur
devoir envers Dieu et envers nous) le principal fondement de leur union et
concorde, tranquilité et repos, et du restablissement de tout cest Estat en sa
premiere splendeur, oppulence et force, comme de nostre part nous promettons de
la faire exactement observer, sans souffrir qu'il y soit aucu-nement
contrevenu. Pour ces causes, ayans, avec l'advis des princes de nostre sang,
autres princes et officiers de la couronne, et autres grandz et noapps
personnages de nostre Con-seil d'Estat estans pres de nous, bien et
dilligemment poysé et consideré tout cest affaire, avons, par cest eedit
perpetuel et irrevocable, dict, declaré et ordonné, disons, declarons et
ordonnons :
aNavarre, conte de Provence, Forcalquier et terres adjacentes A3. boccurence C. cont souvent C.
XIII, 01
L’article sixiesme dud. edict touchant la liberté de conscience et permission à
tous les sujets de Sa Majesté de vivre et demeurer en ce royaume et pays de son
obeissance aura lieu et sera observé selon sa forme et teneur, mesmes pour les
ministres, pedagogues que tous autres quiamesme pour les ministres, professeurs et maistres d'escole et generalement pour ceulx qui C sont ou seront de lad. Religion, soient
regnicoles ou autres, en se comportans au reste selon qu’il est porté par led.
edict.
amesme pour les ministres, professeurs et maistres d'escole et generalement pour ceulx qui C.
XV, Préambule
Aujourd’huy dernier jour d’avril 1598, le roy etant à Nantes, voulant donner
tout le contentement qu’il luy est possible à ses sujets de la Religion
pretendue reformée2 sur les demandes et
requestes qui luy ont esté faites de leur part pour ce qu’ils ont estimé leur
estre necessaire, tant pour la liberté de leurs consciences que pour
l’asseurance de leurs personnes, fortunes et biens, et pour l’asseurance que Sa
Majesté a de leur fidelité et sincere affection à son service, avec plusieurs
autres considerations importantes au bien et repos de cet Estat, Sad. Majesté,
outre ce qui est contenu en l’edict qu’elle a nouvellement resolu et qui doit
estre publié pour le reglement de ce qui les concerne, leur a accordé et promis
:
2 Dans E1, l’expression “
Religion pretendue reformée ” est toujours abrégée en “ Religion P. Reformée
”, comme dans le brevet des pasteurs, pour les raisons qui ont été indiquées
(n° XIV, note 2). Dans E2, à partir de l’article
11, elle est abrégée en “ R.P.R. ”.